AccueilFlèche ActualitésFlècheQuotidiensFlècheTerres rares au Témiscamingue: un projet minier qui inquiète

Terres rares au Témiscamingue: un projet minier qui inquiète

Le vendredi 6 septembre 2013

Le monde minier cherche à briser le quasi-monopole de la Chine des terres rares, une famille de minéraux essentiels en électronique.

Terres rares au Témiscamingue: un projet minier qui inquiète

L'industrie minière québécoise ne fait pas exception et le projet de Matamec Explorations au Témiscamingue pourrait devenir en 2016 la première mine de terres rares au pays.

Cependant, ce projet de 374 millions de dollars suscite l'inquiétude, entre autres parce qu'il rejetterait des milliers de tonnes de résidus radioactifs.

Cette semaine, 150 personnes ont manifesté à Kipawa pour demander que le projet de Matamec soit soumis au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE).

 

Détail important: dans son état actuel, le projet de Matamec échappe à la procédure québécoise d'évaluation environnementale.

Seules les mines qui traitent plus de 7000 tonnes de minerai par jour doivent obligatoirement publier une étude d'impact et sont susceptibles d'être soumises à une audience publique.

Une demande d'un organisme inquiet

Ugo Lapointe, de la Coalition Pour que le Québec ait meilleure mine, presse le ministre du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP), Yves-François Blanchet, de modifier ce règlement ou encore d'utiliser son pouvoir pour ordonner un examen au moins partiel du projet.

«Il ne manque pas de justificatifs, dit M. Lapointe. Le ministre a le pouvoir de décréter un BAPE sur des aspects spécifiques comme la radioactivité. Le gouvernement peut aussi changer le règlement qui fixe la limite de 7000 tonnes. C'était une promesse du Parti québécois et ils ne l'ont pas fait. C'était aussi prévu dans le projet de loi déposé par la ministre [des Ressources naturelles] Martine Ouellet.»

De son côté, André Gauthier, président de Matamec, affirme être prêt à défendre son projet devant le BAPE.

«Toutes nos études sont faites en fonction d'un BAPE et notre étude de faisabilité est en fonction du nouveau projet de loi, dit-il. On va démontrer que notre projet est acceptable du point de vue social et environnemental.»

M. Gauthier affirme que son entreprise travaille sur le terrain depuis 2009 pour faire accepter le projet et que des ententes ont été conclues avec deux communautés autochtones voisines.

Il assure que la radioactivité des rejets miniers sera faible et que les éléments radioactifs ne seront pas transportés hors du parc de résidus par le ruissellement.

De ce point de vue, ajoute-t-il, les rejets seront conformes à la réglementation fédérale en vigueur.

Cependant, rétorque M. Lapointe, cette réglementation fédérale a été jugée inadéquate dans un rapport commandé par Environnement Canada et terminé l'an dernier.

«Il est important de noter que le thorium et l'uranium sont considérés comme des matériaux radioactifs d'origine naturelle et que leur émission n'est pas réglementée par la Commission canadienne de sûreté nucléaire», note la firme Cheminfo dans son rapport.

Avertissement de l'EPA

Du côté américain, l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis (EPA) a publié, il y a moins d'un an, un rapport sur l'impact des mines de terres rares.

«Les métaux lourds et les radionucléides associés aux résidus miniers de terres rares constituent le plus grand risque pour l'environnement s'ils ne sont pas contrôlés, note l'EPA. Toutefois, l'adoption de nouvelles technologies et méthodes de gestion a le potentiel de réduire le risque de contamination environnementale.»

L'EPA souligne qu'après 40 ans d'exploitation, la mine Bayan Obo, en Chine, a produit un parc de résidus de 11 km2 qui a contaminé de façon radioactive le sol, l'eau souterraine et la végétation des environs.

Le projet de Matamec implique une mine à ciel ouvert de 1,3 km de longueur sur 300 m de largeur au nord de la rivière Kipawa. Le minerai serait transporté par camion jusqu'à l'usine de traitement à 6 km au sud de la rivière. Le parc de résidus serait encore plus au sud, à 10 km de la rivière.

La rivière Kipawa se jette dans le lac du même nom, où l'on vient de créer un parc national et où Marie-Claude Labranche, qui a appelé La Presse pour faire part de ses inquiétudes, passe ses étés.

«On peut se réjouir d'un projet industriel dans la région, dit-elle. Mais plus je lis et plus je trouve que c'est un projet qui va produire beaucoup de déchets. Les résidants et les Québécois méritent d'être mieux informés.»

 

Charles Côté, La Presse

Aimez-vous cette nouvelle?

Retour à la liste des articles du Quotidiens